La prochain fois je viserai le coeur

Synopsis

Entre 1978 et 1979, les habitants de l'Oise se retrouvent plongés dans la terreur : un maniaque sévit, prenant pour cibles des jeunes femmes. Au volant de sa voiture, il blesse et tue des auto-stoppeuses choisies au hasard. L'homme est partout et nulle part, échappant aux pièges des enquêteurs et aux barrages. Il en réchappe d'autant plus facilement qu'il est en réalité un jeune et timide gendarme qui mène une vie banale au sein de sa brigade... et qui est chargé d'enquêter sur ses propres crimes.

Critiques

Cette histoire vraie d'un homme double, incarné avec une douce ferveur par Guillaume Canet, est constamment déstabilisante et passionnante.

Les Fiches du Cinéma

Un récit glauque pour un personnage glaçant. (...) Guillaume Canet offre une interprétation énigmatique d'une exceptionnelle qualité.

Le Parisien

Le troisième long métrage de Cédric Anger, son meilleur, s’intéresse à l’étrange cas d’un gendarme serial killer à la fin des années 70. le réalisateur a une jolie formule dans le dossier de presse : « À la limite, il aimerait s’arrêter lui-même. » Ce vertige est esquissé sans jamais que sa schizophrénie soit explorée.

Cahiers du Cinéma




« La prochaine fois je viserai le cœur » : la traque sans issue du détraqué de l’Oise

Dans les années 1978-1979, on l’appelait « le tueur de l’Oise »

Qu’il les renverse avec sa voiture ou qu’il les abatte après les avoir prises en auto-stop, ses cibles étaient toujours des jeunes filles. Avant de tirer, il avait cette phrase curieuse : « Attention, je vais vous faire mal. » Et comme, parfois, il ne tuait pas sa victime sur le coup, dans les lettres qu’il adressait aux enquêteurs, il précisait : « La prochaine fois, je viserai le cœur. » Les gendarmes eurent d’autant plus de mal à arrêter le tueur que, gendarme lui-même, il participait à l’enquête.

Ce fait divers, Cédric Anger a choisi de le raconter en se plaçant du point de vue de Franck, le gendarme tueur. Le résultat est digne des meilleurs films noirs de Jean-Pierre Melville (1917-1973). Pour son troisième long-métrage (après Le Tueur en 2008 et L’Avocat en 2011), comme le réalisateur du Cercle rouge, Anger s’empare d’un genre – le polar, le film d’action – pour affirmer son style, fait d’un mélange de réalisme et de poésie. Melville avait souvent recours à des adaptations de roman ; Anger, lui, se sert de la réalité.


Alain Lamare voulait être un héros

Le tueur de l’Oise a existé – il s’appelait Alain Lamare. Apprécié par ses supérieurs, il ne cachait pas son souhait de partir ailleurs, dans des unités d’élite comme le GIGN. Il voulait se prouver qu’il pouvait être autre chose qu’un petit gendarme. Même négatif, il voulait être un héros. L’enquête telle qu’elle est retracée dans le film, est conforme à ce qui s’est passé il y a quarante ans et qui est relaté dans Un assassin au-dessus de tout soupçon (Yvan Stefanovitch, J’ai lu, 2001).


Une voiture roule dans la nuit à la recherche de sa proie : dès le premier plan-séquence, la cause est entendue. Une jeune fille en mobylette est heurtée par une voiture qui la suivait. Projetée sur le bas-côté, visée à bout portant par le chauffard, la victime n’a pas le temps d’apercevoir le visage de son agresseur. Violence brute : Claude Chabrol mais aussi Robert Aldrich ne sont pas loin non plus.


Le tueur rentre chez lui. Il est 3 h 14, son réveil sonne. Le temps de se changer et l’on aperçoit enfin son visage : Franck, gendarme de son état, tueur à ses moments perdus. Jusqu’à la fin du film, la caméra de Cédric Anger ne le quittera plus. Guillaume Canet, qui l’interprète, n’a jamais été aussi bon. Hermétique et silencieux comme le Alain Delon duSamouraï, physique à la manière du Jean-Paul Belmondo des films de Jean-Luc Godard.


« On va l’avoir, ce salaud ! »

D’emblée, un autre « ingrédient » affirme son importance : la musique. Composée par Grégoire Hetzel, elle accompagne de manière très particulière les variations et l’intensité des sentiments éprouvés par Franck.

Franck est, de tous les gendarmes qui enquêtent sur ces crimes, le plus motivé, le plus véhément. « On va l’avoir, ce salaud ! » dit-il. Le pari – réussi – de Cédric Anger est de ne le montrer qu’en action – en gendarme, en tueur, en dragueur maladroit, en grand frère attentionné, en homme traqué… Adepte de l’automutilation, il se vit en guerrier, incapable de nouer une relation suivie avec une femme, troublé lorsqu’il se rend, pour l’enquête, sur les lieux de drague homosexuels. Réprimant sa véritable nature, il entretient un curieux rapport avec l’abject. A son petit frère qui vomit lors d’une sortie en forêt il dit :« Cela fait du bien, ça purge. On a besoin de sortir la saleté qu’on a à l’intérieur. »


Deux scènes d’anthologie

 On n’en saura guère plus sur les pulsions psychiatriques qui taraudent cette personnalité pathologique, en proie à un imaginaire viril, fascinée par l’ordre et la morale, mais parfois assaillie par une irrépressible envie de tuer des jeunes femmes.

Le soleil ne brille jamais dans ce coin perdu de l’Oise. A croire que la part d’ombre de ce gendarme a fini par entraver la lumière. En deux scènes d’anthologie, Cédric Anger fait montre de son talent de cinéaste. Il y a d’abord ce moment où, traqué, Franck ira se réfugier sous l’eau plusieurs heures durant, ne respirant qu’au moyen d’un roseau. Une autre nuit, s’improvisant poète, il emmènera ses collègues dans cette forêt où il aime trouver refuge, juste le temps d’entrapercevoir une harde de cerfs et de biches.


Confondu par ses empreintes, Franck finira par être arrêté avant d’être déclaré non responsable de ses actes pour « état de démence » au moment des faits. « La tête dans les étoiles, les pieds dans la gadoue »– l’expression est de Cédric Anger –, le tueur de l’Oise restera une énigme. L’énigme du gendarme tueur qui aurait tant voulu s’arrêter lui-même.


Le Monde / Par Par Franck Nouchi

Adapté d'un fait divers

Années 70. Alors que l’Oise peine à se remettre des ravages de Marcel Barbeault, le tristement célèbre  « tueur de l’ombre », un nouveau tueur laisse de nombreuses victimes sur son passage. Quelques mois de traque plus tard, les soupçons s’éclaircissent et se dirigent vers… un gendarme, en la personne d’Alain Lamare. L’affaire défraye la chronique et le meurtrier en série est vite interpellé. Jugé inadapté, il ne sera jamais emprisonné. Le phénomène fait vite l’objet d’une pièce radiophonique de Jean Thibaudeau avec pour titre "Poker tournant", mais aussi d’une nouvelle du journaliste d’investigation Yvan Stefanovitch intitulée "Un assassin au-dessus de tout soupçon". Le sujet n'est pas non plus passé inaperçu de Cédric Anger, qui adapte ici l’histoire du tueur au double visage, avec Guillaume Canet dans le rôle principal.

Du point de vue du tueur

Afin de se démarquer des traditionnelles adaptations de faits divers, Cédric Anger a fait le choix de tourner La Prochaine fois je viserai le cœur, en faisant de l’antihéros (Franck, joué par Guillaume Canet), le héros et l’élément central du film : "Je ne voulais pas faire un film de traque, être avec les types qui cherchent le maniaque. Y en a déjà eu plein", explique-t- il, avant d’ajouter : "Dans cette histoire, c’est le personnage qui m’intéressait, son comportement, ses errances, ses déplacements… J’ai préféré être avec lui, essayer d’en faire un portrait. Mais pas psychologique. Juste “behavioriste”. De toute façon il n’y a pas d’explication à ses actes et la justice a été incapable d’en donner une, alors pourquoi moi j’expliquerais quoi que ce soit ? Je suis parti de là. Faire le portrait d’un type qu’on ne peut pas comprendre, qu’il soit une énigme encore plus grande à la fin du film."

Entretien avec Guillaume Canet

La musique du film

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