Hippocrate

Synopsis

Benjamin va devenir un grand médecin, il en est certain. Mais pour son premier stage d'interne dans le service de son père, rien ne se passe comme prévu. La pratique se révèle plus rude que la théorie. La responsabilité est écrasante, son père est aux abonnés absents et son co-interne, Abdel, est un médecin étranger plus expérimenté que lui. Benjamin va se confronter brutalement à ses limites, à ses peurs, celles de ses patients, des familles, des médecins, et du personnel. Son initiation commence.

Critiques

« Hippocrate » : un regard juste et drôle sur l'hôpital public

Jamais sans doute, dans un film français, l'hôpital public n'avait été montré avec une telle justesse, une telle précision ; jamais la réalité du monde hospitalier, les problèmes auxquels doivent faire face ceux qui y vivent, qu'ils soient médecins, infirmiers, aides-soignants ou patients, n'avaient été observés avec une telle acuité. Hippocrate, le film de Thomas Lilti, ne serait que cela, ce serait déjà formidable. Mais comme il s'agit, en plus, d'un film épatant, drôle, émouvant, intelligent, on commencera par une prescription : à voir sans tarder.

 

 

Au départ, c'est l'histoire de Benjamin (Vincent Lacoste), dont c'est le premier jour du premier stage en tant qu'interne dans le service de médecine interne d'un hôpital parisien. Il n'a pas choisi la facilité : son père, le professeur Barois (Jacques Gamblin), en est le tout-puissant chef de service.

 

Un type sympa, ce Benjamin, avec son air un peu ahuri d'adolescent attardé, même si on n'est pas forcément très rassuré, pour lui et pour ses malades, lorsque la chef de clinique, le docteur Denormandy (Marianne Denicourt), lui dit qu'il aura désormais sous sa responsabilité pas moins de dix chambres et dix-huit patients.

 

PONCTION LOMBAIRE

 

Il est à peine arrivé dans le service que Myriam, une infirmière du service (Carole Franck), lui demande de faire une ponction lombaire à un patient. Bravache, il se lance dans l'opération, faisant mine de savoir où et comment planter l'aiguille. Heureusement, Abdel, un collègue algérien « faisant fonction d'interne » (Reda Kateb), passait par là. « Laisse-moi faire » : le ton et le geste assurés, il ne lui faudra que quelques secondes pour sortir son confrère du pétrin.

 

L'obstacle de la ponction franchi, Benjamin crut la partie gagnée. Sa première garde s'était passée sans encombre. Il y avait bien eu ce patient qui se plaignait de douleurs et à qui les infirmières n'avaient pas fait l'électrocardiogramme (ECG) que Benjamin avait – mollement – réclamé.

 

Mais, avec des antalgiques, les choses finiraient bien par rentrer dans l'ordre. Au petit matin, le service paraissait calme, et lui, l'interne de garde, se prenait même des envies de frime. Il lui fallut vite déchanter. Le patient de la nuit venait d'être trouvé mort dans sa chambre. Que s'était-il passé ? Où était passé l'ECG qui avait dû être pratiqué, forcément ?

 

 

Cette erreur médicale manifeste constitue le premier fil dramatique d'Hippocrate, le premier cas de conscience de Benjamin. Le second, en forme de dilemme éthique, a trait à une vieille dame souffrant d'insuffisance respiratoire qui voudrait tout simplement ne plus souffrir et qu'on la laisse mourir tranquillement.

 

Dans les deux cas, Benjamin se retrouvera face à Abdel. Lui, le fils de mandarin, l'interne qui tout naturellement trouve sa place en salle de garde auprès de ses pairs, devra admettre que ce médecin algérien, sous-payé, qui vit seul dans une chambre misérable à l'hôpital, est largement plus compétent que lui.

 

Par la force des choses, il devra accepter l'idée d'être en quelque sorte initié par lui aux bonnes pratiques hospitalières. Jusqu'à finir par lui en être redevable et tout tenter pour que sa situation injuste s'améliore.

 

Les acteurs de ce film sont tous hallucinants de justesse et de vérité. Sous la direction de Thomas Lilti, qui est lui-même médecin, ils parviennent à reproduire devant la caméra les mille et un gestes, les mille et une paroles si caractéristiques de l'exercice médical.

 

 

MAUX DE L'HÔPITAL

 

Non content d'avoir réussi cette reproduction « à l'identique » du monde hospitalier, de son atmosphère, de ses us et coutumes, de ses hiérarchies et de ses jeux de pouvoir, Lilti a voulu aller encore plus loin, jusqu'à poser, au travers d'un mouvement de grève, les enjeux de l'hôpital public à l'heure des restrictions budgétaires. Cet ECG que Benjamin n'a pas obtenu, les infirmières l'affirment, c'est parce que tous les appareils étaient obsolètes.

 

Plutôt que de s'en prendre aux lampistes, l'administration hospitalière et les autorités sanitaires feraient mieux de s'interroger sur les conséquences médicales de ce qui ressemble fort à une politique d'austérité aveugle et sourde.

 

Il y a, dans cet exposé des maux de l'hôpital, un côté catalogue qui pourrait à la longue lasser s'il n'y avait, de la part du réalisateur, cette volonté opiniâtre de ne rien laisser de côté, de tout montrer pour mieux faire comprendre. Manque de personnel, manque de moyens, l'hôpital public craque de partout : Hippocrate le dit fort bien, et avec force, au point que l'on ne saurait trop recommander à François Hollande et à ses ministres d'aller, eux aussi, voir ce film sans tarder.

 

LE MONDE / Par Franck Nouchi

 

 

 

Une grande part autobiographique

Le réalisateur Thomas Lilti s’est inspiré de son histoire personnelle pour Hippocrate. Il fut en effet médecin et fils et de médecin, comme le personnage du film, Benjamin (second prénom du réalisateur). Il se souvient : "(...) la pression familiale aidant, on m’a fait comprendre qu’il vaudrait mieux commencer par faire de « vraies » études. Mon père étant médecin, j’ai opté pour la fac de médecine pour acheter ma tranquillité."

 

                     Le réalisateur Thomas Lilti 

 

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