L'institutrice

Synopsis

Une institutrice décèle chez un enfant de 5 ans un don prodigieux pour la poésie. Subjuguée par ce petit garçon, elle décide de prendre soin de son talent, envers et contre tous.

Critiques

  

Nadav Lapid prolonge avec "L’Institutrice" l’impressionnant alliage de calme et de tension extrême qui parcourait "Le Policier" il y a deux ans. Sa mise en scène est à l’image du mystère qui traverse le film : moins en quête de virtuosité que d’une sorte de tremblement du sens dans la limpidité des cadres.

Cahiers du Cinéma


En associant la lucidité du roman (rendre justice à l'ambiguïté de toute chose) et le lyrisme de la poésie (rendre toute chose intense), Nadav Lapid signe un grand film.

Le Fiches du Cinéma



Pour évoquer L'Institutrice, le nouveau et passionnant film du cinéaste israélien Nadav Lapid, peut-être faut-il partir de son résumé tel qu'il figure dans le dossier de presse : « Une institutrice décèle chez un enfant de 5 ans un don prodigieux pour la poésie. Subjuguée par ce petit garçon, elle décide de prendre soin de son talent, envers et contre tous. »

On imagine aisément à quel point l'auteur a dû souffrir pour écrire ces deux phrases aussi justes que réductrices. Car s'il est bien un film impossible à raconter en quelques mots, c'est bien celui-ci, l'histoire de Yoav, un petit garçon poète, et de Nira, son institutrice, elle-même apprentie poétesse.

Certes, la poésie et les questionnements qu'elle peut induire sont au cœur de ce film : comment naissent les mots du poète ? Quelle place occupe la poésie dans une société envahie par le matérialisme ? Mais elle est aussi un viatique dont Nadav Lapid se sert pour introduire une réflexion philosophique sur l'Etat d'Israël, et par-delà, sur l'état du monde. De notre monde.

UNE POÉSIE D'AMOUR À 5 ANS

Tout commence à la télévision israélienne. Chez lui, affalé sur un canapé, un homme regarde un de ces talk-shows débiles comme on en voit un peu partout. A l'écart du bruit, dans sa chambre, une femme pianote sur son ordinateur. C'est elle, Nira, l'institutrice du film (Sarit Larry). Peu après, on découvre Yoav, un petit bonhomme blondinet (Avi Shnaidman), comme s'il était pris d'une espèce de transe : « J'ai un poème ! » Tout en marchant en rond avec sa gestuelle hésitante et une manière très particulière de siffler certaines syllabes, le voilà qui déclame un poème surgit d'on ne sait où : « Hagar est assez belle/Assez pour moi/Une pluie d'or tombe sur sa maison/Véritable soleil de Dieu… » Une poésie d'amour, comme ça, à 5 ans ! Nira est subjuguée ( ...)

 

« PRESQUE AUSSI DOUÉ QUE MOZART »

Pour ce faire, comme si elle se sentait investie d'une mission, elle écartera Miri, la belle nounou de Yoav, à qui il arrivait parfois de s'attribuer l'un de ses poèmes pour passer un casting. Elle tentera de faire prendre conscience au père de Yoav, un restaurateur à la mode, du génie de son fils. « Il est presque aussi doué que Mozart », lui dira-t-elle. Ce supposé génie, le père, à vrai dire, n'en a cure. Il a trop vu son frère vouloir être poète et finir par devenir « loser ». Ce qu'il veut pour Yoav, c'est qu'il mène une vie normale. Qu'il soit un petit garçon comme les autres.

Nira en est à présent convaincue, cette époque « hait les poètes ». Même les « poètes professionnels » ne sont que d'affreux cuistres, assoiffés de carrière et de reconnaissance. Elle-même souffre de sentiments ambivalents. A mesure que le film progresse, son attachement de moins en moins maîtrisé pour cet enfant se double d'un comportement aussi peu louable que celui de la nounou. Ne s'est-elle pas, elle aussi, pour briller devant ses pairs, attribuée un texte de son protégé ?

 

SARIT LARRY, BELLE, PROFONDE, INTELLIGENTE

L'Institutrice ne se résume pas aux rapports entre cette enseignante et l'un de ses élèves. A maintes reprises, un peu comme il l'avait fait dans son précédent et tout aussi passionnant film, Le Policier, Lapid élargit le cadre, faisant apparaître aussi bien les rapports que la société israélienne entretient avec son armée que l'envahissement des grandes stations balnéaires du sud du pays par ces hôtels-clubs monstrueux qui poussent comme des champignons aux quatre coins du monde. Sans parler de cette savoureuse et fort instructive discussion entre Nira et Yoav sur une plage de Tel-Aviv, à propos des « disparités » entre ashkénazes et séfarades en Israël…

D'un point de vue strictement cinématographique, L'Institutrice est remarquable, avec cette manière propre à Lapid de mélanger différentes manières de filmer – de nombreux plans-séquences très sophistiqués, souvent au ras du sol, à hauteur d'enfants, alternent avec une série de gros plans magnifiques. Usant parfois de plans subjectifs, Lapid cherche à capter les regards pour mieux les confronter.

Impossible également de parler de ce film sans évoquer les performances des acteurs, et en tout premier lieu celle de Sarit Larry. Belle, profonde, intelligente, elle sait user de son talent pour, parfois, emmener son personnage aux confins d'une personnalité borderline.

LE MONDE / PAR Franck Nouchi

 

 

Dossier de presse en téléchargement

L INSTITUTRICE 2.DP.pdf
Document Adobe Acrobat 1.8 MB


Un film autobiographique

"Entre l’âge de quatre ans et demi et sept ans, j’ai dû écrire une centaine de poèmes ou plus précisément, je les ai récités à ma nounou", raconte Nadav Lapid, en poursuivant : "À sept ans, j’ai arrêté d’écrire et je ne voulais plus entendre parler de poésie. Ce n’est qu’à la fin de mon service militaire que j’ai de nouveau écrit, mais jamais plus de poésie. Mes parents ont mis mes poèmes au placard et ils y sont restés pendant vingt-cinq ans, jusqu’à ce que j’envisage d’en faire la matière d’un film."

Les poèmes "Hagar" et "Une séparation" que l'on peut entendre dans L'Institutrice ont été écrits par le réalisateur, lorsqu'il était enfant. Ce second film manifeste donc une dimension autobiographique : "de la même manière que je suis l'enfant, je suis également l'institutrice. Cette angoisse et ce sentiment d’urgence qu’éprouve l’institutrice devant la marginalisation d'un certain art, d’une certaine sensibilité, sont ceux que j'éprouve moi-même parfois", confie-t-il.


Filmer des enfants

Avi Shnaidman a cinq ans lorsqu'il joue pour la première fois au cinéma, en interprétant le petit poète Yoav dansL'Institutrice. Choisi parmi tant d'autres, le réalisateur explique ce qui l'a conduit à lui confier le rôle principal de son film : "Avi a une gestuelle un peu hésitante, une manière particulière de « siffler » certaines syllabes et une compréhension instinctive et intime des situations du film. Il a cette hésitation et cette fragilité qui tendent à disparaître chez des enfants plus âgés. Je ne souhaitais pas diriger un enfant qui ait l’air hors norme mais quelqu’un qui soit à la fois un enfant comme les autres avec quelque chose en plus."

Filmer avec des enfants n'est jamais simple. Nadav Lapid explique comment il a procédé : "Il s’agissait d’orchestrer des mouvements de caméra élaborés, des plans séquences construits, organisés, tout en saisissant la spontanéité totalement incontrôlable des enfants. Ne pas soumettre la caméra au chaos des enfants mais créer une tension, presque confronter la rigidité des mouvements de caméra et le désordre des enfants. Ces derniers défiant sans cesse l'ordre que la caméra tente d’imposer. Un conflit entre le cadre et ce qui se passe à l’intérieur."

Newsletter

Recevez la programmation du cinéma chaque lundi ainsi que des informations sur nos événements.

Note : veuillez remplir les champs marqués d'un *.

Cinéma Le Vagabond

3 Bis Bd de la république

10200 Bar sur Aube

Tél : 03.25.27.99.30