Brèves de comptoir

Synopsis

Une journée de la vie du Café L'Hirondelle, sur une petite place de banlieue, en face d'un cimetière. De l'ouverture à 6h30 jusqu'à la fermeture à 22h30, les clients entrent, boivent, parlent, sortent, rerentrent, re-boivent et reparlent de plus belle. Ils composent un drôle d'opéra parlé, une musique tendre et cocasse, un cantique de pensées frappées au coin du plaisir d'être ensemble, un verre de vin blanc à la main. Le génie populaire danse.

Critiques

C'est un bistrot comme on en fait tant, comme on n'en fait plus. Hors temps et hors norme. Un vrai bistrot de cinéma, aussi faux qu'il faut, plus vrai qu'un vrai. Jean-Michel Ribes l'a coincé entre deux fantômes : le réalisme poétique du cinéma français d'avant guerre et la poésie réaliste d'Alain Resnais, dont il a été le collaborateur pour Coeurs. Juste en face du bistrot s'étend, d'ailleurs, un cimetière qui pourrait bien être celui où se réunissent les personnages des deux derniers films de Resnais : Vous n'avez ­encore rien vu ! et Aimer, boire et chanter. Avec l'humour noir qu'on lui connaît, Jean-Michel Ribes fait défiler, à plusieurs reprises, dans la rue qui sépare le bar des tombes, de superbes convois funéraires. Sans doute comme pour rappeler aux soiffards inconscients l'issue fatale et, vu la quantité des boissons qu'ils avalent, extrêmement proche.

 

Le dialogue n'est fait que des « brèves de comptoir », recueillies, durant des années, par Jean-Marie Gourio, mais on croirait inventées les formules. « L'avenir, je préférais celui d'avant. » « Mon plus grand chagrin d'amour, c'est que personne ne m'aime. » Sans oublier celle-là, vraiment extra : « J'ai joué la date de naissance de ma femme, celle de ma mère, celle de ma fille, j'ai pas eu un seul numéro. C'est vraiment une famille de cons. »

 

L'habileté du cinéaste, c'est d'avoir su, autour de ces répliques, créer un monde. Cabossé. Excentrique. Peuplé de silhouettes magnifiques : ce peintre (Bruno Solo), de plus en plus hagard à force d'alterner la bière et le blanc. Ou cet irrésistible croque-mort (Laurent Gamelon) versant, en fin de ­journée, dans une démesure digne de W.C. Fields. L'irréalisme frôle, alors, le surréalisme. Quand un chauffeur de taxi massif, flanqué d'un chien minuscule, se voit répondre par la fille qu'il drague qu'elle aimerait avoir de grands pieds parce qu'elle aime les chaussures, on est en plein dada. Et lorsque la patronne, comme saisie de nostalgie, se met à danser face à un vieux client qui titube, ivre d'alcool et de chagrin, on est dans l'émotion pure. Une émotion émotionnante qui se moque d'être légèrement ridicule.

 

Peu à peu naît l'inquiétude. La nuit est là, le cimetière devient tout proche. Tous les clients, qu'ils soient affreux, sales et méchants ou gentils, purs et ­esseulés, se rapprochent ; ils ne veulent pas quitter ce lieu qui les tue et les sauve... C'est pas simple de boire. C'est pas simple de vivre non plus. Féroce et tendre, le film défend une notion surannée et essentielle : la solidarité.

  

Télérama / Par Pierre Murat

D'Hara Kiri au grand écran

Les Brèves de comptoir sont à l'origine des anecdotes recueillies aux comptoirs de cafés et bistrots français par Jean-Marie Gourio, ancien journaliste chez Hara Kiri qui les publiaient dans les colonnes du journal satirique. Elles ont ensuite été éditées sous forme de recueils à partir de 1988, puis adaptées par Jean-Michel Ribes à la télévision dans la série Palace (1988), au théâtre en 1994 et 1999 et portées aujourd'hui au cinéma par ce dernier.

Rencontre avec Jean-Michel Ribes et Jean-Marie Gourio, les deux porteurs du projet, et deux des comédiennes, Valérie Mairesse et Chantal Neuwirth...

Le secret de Gourio

Où Jean-Marie Gourio recueille-t-il ses brèves? Sur quels critères les sélectionne-t-il? Qui en sont les véritables auteurs? Autant d'interrogations qui étaient jusqu'alors restées sans réponses. L'auteur et scénariste nous révèle son secret : « Chaque jour, et aujourd’hui encore, je m’installe au bout d’un zinc. (…) Debout. Les meilleures viennent de gens qui passent leur temps dehors, et viennent se réchauffer. Pour eux – postiers, agents des pompes funèbres, égoutiers, garagistes, ouvriers du bâtiment, éboueurs, chômeurs… – le bistrot est un havre où il fait bon discuter. (…) J’ai mes habitudes dans plusieurs bistrots, selon les horaires et les jours de la semaine. Je commande ma bière, j’attends, j’écoute. De ma place, je vois tout sans être repéré, j’entends plusieurs conversations en même temps. Il faut saisir les brèves et les noter immédiatement, sinon on en perd la formulation qui en fait le sel. Il faut que ça soit volé aussi, buissonnier pour que ça soit joli. (...) Sur tout ce que j’entends quotidiennement, j’en sélectionne environ 3000 par an qui sont des perles…»

Tournage parisien

Fidèle à l'ambiance des bistrots populaires où Jean-Michel Gourio glanait ses brèves, Jean-Michel Ribes a posé ses caméras en France, notamment à Paris et en région parisienne. Le tournage s'est déroulé du 13 septembre au 31 octobre 2013.

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