Festen (fête de famille)

Interdit aux moins de 12 ans

Synopsis

Le patriarche Helge Klingenfelt fait préparer une grande fête pour ses 60 ans. Parmi les convives, Christian, le fils aîné, est chargé par Helge de dire quelques mots au cours du dîner sur sa soeur jumelle Linda, morte un an plus tôt. Personne ne se doute que Christian va profiter de ce petit discours pour révéler de terribles secrets...

Les critiques à la sortie (1998)

Le "Pour" de Télérama


Au départ de tout élan créateur, il y a une conviction orgueilleuse, qui contient sa part d’imposture. Sans l’arbitraire et despotique « voeu de chasteté » que lui proposait son compatriote Lars von Trier, le jeune Thomas Vinterberg serait peut- être aujourd’hui l’« honnête cinéaste danois » que laissait entrevoir son premier film. Mais voilà, il y a eu ce fameux Dogme (voir pages suivantes), dont Vinterberg dit avoir senti dès le début qu’il serait pour lui « une grande source d’inspiration ». Le résultat, cette très corrosive Fête de famille (Festen n’est vraiment pas, malgré son titre français et sa date de sortie, un « film de Noël »), rappelle une évidence oubliée : les contraintes peuvent être fécondes et libératoires. En soi, rien de neuf, dans ce Dogme, à part son hétéroclisme saugrenu : aux règles strictes de la tragédie classique – unité de lieu et de temps, personnages torturés par des conflits intérieurs –, les lurons de Copenhague ont ajouté la légèreté de la Nouvelle Vague, caméra à l’épaule, son direct, éclairage minimal. Si nouveauté il y a, elle est ailleurs, dans cette conscience radicale que la forme détermine le sujet, que sans elle, il n’aurait pas existé. Il serait donc vain de chercher à dissocier les deux, d’admirer par exemple la maîtrise dramatique de Vinterberg pour mieux rejeter ses « outrances » stylistiques. Il serait tout aussi illusoire de chercher une trace autobiographique dans cette effroyable et salutaire fête de famille. Pas plus qu’il n’y a quelque chose d’intrinsèquement pourri au royaume du Danemark, il n’y a grand traumatisme dans la vie du jeune Vinterberg. Ce sont, dit-il, les règles de Dogme qui induisent des « portraits de groupe ». Voici donc, après les Atrides, les Klingenfelt : l’immémoriale et épouvantable tragédie familiale… Christian Klingenfelt, héros intemporel et sans attaches. Bien à l’image de ce premier plan, saisissant, qui le voit marcher au loin sur une route ondulant à travers champs, un téléphone portable à l’oreille, oripeau de la modernité ici incongru. Dès cet instant, Christian semble mû par une volonté qui le dépasse, la force qui pousse les héros tragiques à accomplir leur destin.

[...]

Les premières minutes de ce film peuvent dérouter, voire agacer. Festen est tourné en vidéo, comme ces films amateurs qui constituent le triste lot de toutes les réunions de famille ; il y a toujours quelqu’un pour enregistrer la frénésie, l’agitation, ce mélange d’excitation enjouée, surjouée, qui caractérisent les retrouvailles ; et ça tremble, ça bouge, ça saute du coq à l’âne, de la belle-soeur hystérique au majordome placide. Mais dans ce mouvement, il y a de la vie, et cette fois-ci, le vidéaste Vinterberg la capte fichtrement bien, en même temps qu’il révèle un tissu de liens anciens et complexes avec le personnel de cette maison. Jusqu’à ce plan dans le tube d’aspirine, énorme, provoquant, métaphore exacerbée du boyau familial, du secret. Dès lors, l’image va peu à peu se calmer. Et s’impose une autre sensation, à laquelle contribue largement le grain évanescent de l’image vidéo : le film de famille s’éloigne, on est entré au royaume des fantômes. Fantôme de la soeur morte, bien sûr, flottant dans l’atmosphère qui s’épaissit au fil des révélations successives de Christian ; mais aussi fantômes de tous les participants, dont l’enveloppe charnelle – et pas seulement la stature sociale – semble se décomposer à mesure qu’ils « nient » ces révélations. Paradoxalement, c’est dans ces instants où le film tout entier plonge dans l’immatériel, que Vinterberg scrute au plus près, avec une acuité magistrale, les expressions, les attitudes, les comportements. De cette façon, dans cette thérapie familiale de choc avec éviction du monstre, chacun des personnages échappe à son archétype, gagne en intensité, en grandeur, y compris celui qui va déchoir. Un tel bonheur artistique, bien sûr, est le fruit de la méthode. C’est la légèreté de l’infrastructure qui a permis aux acteurs de vivre intensément ce huis clos. On pense à l’esprit de troupe, et à l’engagement, qui animait les films de Fassbinder. On voit aussi, dans la richesse des personnages et la cruauté de la règle du jeu, l’empreinte de Renoir. Ainsi, les solidarités fraternelles, amicales, électives seront venues à bout de l’esprit clanique.


Vincent Rémy / 23/12/1998

Le Dogme 95

Qu'est-ce que c'est?


Le Dogme95 est un mouvement cinématographique lancé en 1995 par des réalisateurs danois sous l'impulsion de Lars von Trier et de Thomas Vinterberg.


Le Dogme95 est lancé en réaction aux superproductions anglo-saxonnes et à l'utilisation abusive d'artifices et d'effets spéciaux aboutissant à des produits formatés, jugés lénifiants et impersonnels. Le but du Dogme95 est de revenir à une sobriété formelle plus expressive, plus originale et jugée plus apte à exprimer les enjeux artistiques contemporains. Dépouillés de toute ambition esthétique et en prise avec un réel direct, les films qui en découlent cristallisent un style vif, nerveux, brutal et réaliste, manifesté généralement par un tournage entrepris avec une caméra 35mm portée au poing ou à l'épaule et avec improvisation de plusieurs scènes.


Les promoteurs du Dogme95, n'appliqueront jamais totalement ces principes, en particulier le dixième, mais tenteront de s'en approcher le plus possible. Un label « officiel » estampille les films répondant suffisamment aux critères du manifeste.


Wikipedia

Le texte du serment


« Vœu de chasteté


Je jure de me soumettre aux règles qui suivent telles qu'édictées et approuvées par Dogme 95.


1. Le tournage doit être fait sur place. Les accessoires et décors ne doivent pas être amenés (si on a besoin d'un accessoire particulier pour l'histoire, choisir un endroit où cet accessoire est présent).


2. Le son ne doit jamais être réalisé à part des images, et inversement (aucune musique ne doit être utilisée à moins qu'elle ne soit jouée pendant que la scène est filmée).


3. La caméra doit être portée à la main. Tout mouvement, ou non-mouvement possible avec la main est autorisé. (Le film ne doit pas se dérouler là où la caméra se trouve ; le tournage doit se faire là où le film se déroule).


4. Le film doit être en couleurs. Un éclairage spécial n'est pas acceptable. (S'il n'y a pas assez de lumière, la scène doit être coupée, ou une simple lampe attachée à la caméra).


5. Tout traitement optique ou filtre est interdit.


6. Le film ne doit pas contenir d'action de façon superficielle. (Les meurtres, les armes, etc. ne doivent pas apparaître).


7. Les détournements temporels et géographiques sont interdits. (C'est-à-dire que le film se déroule ici et maintenant).


8. Les films de genre ne sont pas acceptables.


9. Le format de la pellicule doit être le format académique 35mm.


10. Le réalisateur ne doit pas être crédité.


De plus, je jure en tant que réalisateur de m'abstenir de tout goût personnel. Je ne suis plus un artiste. Je jure de m'abstenir de créer une « œuvre », car je vois l'instant comme plus important que la totalité. Mon but suprême est faire sortir la vérité de mes personnages et de mes scènes. Je jure de faire cela par tous les moyens disponibles et au prix de mon bon goût et de toute considération esthétique.


Et ainsi je fais mon Vœu de Chasteté.


Copenhague, Lundi 13 mars 1995


Au nom du Dogme 95


Lars Von Trier, Thomas Vinterberg »

Des documents pour approfondir

LIVRET PEDAGOGIQUE LYCEE
Un dossier très complet sur le contenu, la forme et certains aspects techniques et éthiques.
festen_lycéens au ciné.docx
Document Microsoft Word 29.3 KB
DOSSIER: LA VÉRITÉ ENTRE PSYCHOLOGIE ET PHILOSOPHIE
Un approfondissement des implications et des répercussions psychologiques et philosophiques de cette étrange "Fête de Famille"
dossier festen _ psychologie et philosop
Document Microsoft Word 24.2 KB
FESTEN ET DOGME : LA QUESTION DE L’AUTHENTICITÉ
Un texte se penchant plutôt sur les raisons d'être du Dogme, essayant de percer et de dépasser une première lecture, peut être un peu simpliste.
Festen-Dogme95authenticite.pdf
Document Adobe Acrobat 208.7 KB
DOGME 95 : UN MOUVEMENT AMBIGU
le chapitre d'un livre collectif concernant un certain nombre de mouvements cinématographiques, qui traite, en profondeur, de l'histoire, du but et des caractéristiques du Dogme 95.
dogme95 chapitre.pdf
Document Adobe Acrobat 7.0 MB

Un lien avec une interview avec Thomas Vinterberg dans laquelle on prend connaissances des dynamiques internes à la création du Dogme95 et à la conception de "Festen". A travers cette conversation se trouve éclairé l'équilibre fragile entre sérieux et ironie, provocation et jeu qui est, peut être, l'essence de ce mouvement artistiques. Malheuresement le texte est disponible uniquement en anglais.


Lien: Thomas Vinterberg by Maria Mackinney



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